Note de l’auteur : cet article est une réécriture/révision de l’article précédemment titré « KBCM ».
De la même manière que je dessine certaines tourelles avant de les intégrer plus tard sur des véhicules, il me faut aussi dessiner certains systèmes et composants.
Comme souvent, il est compliqué de trouver des informations complètes et fiables sur ce genre d’équipement, mais j’ai prévu de l’utiliser sur certains designs à venir. Il s’agit donc de vues d’artiste et d’hypothèses que je corrigerais si de nouvelles informations me parviennent. De la même manière, les noms des différentes versions et évolutions du système ne sont généralement pas connus. Les noms entre guillemets sont donc des « inventions » à titre indicatif.
Protection passive et protection active
Un blindé peut disposer de un à trois types de protection. La première, commune à tous les blindés, est la protection passive, c’est dire celle fournie par son blindage. Il s’agit donc de sa capacité à encaisser les coups et assurer la survie de son équipage.
Avec la progression des armes antichars, missile ATGM puis obus-flèche, les blindages formant la protection passive sont devenus insuffisants avant que de nouvelles techniques, conceptions et alliages fassent remonter le niveau protection passive. Toutefois, cette progression de la protection passive reste parfois insuffisante. Il est impossible de rendre un blindé, même un MBT, invulnérable. C’est ce qui a poussé la création des systèmes de protection active.
Les systèmes de protection active (APS) ont donc pour mission d’empêcher le blindé d’être touché. Cela a débouché sur deux types d’APS. Tout d’abord les APS soft-kill dont l’objectif est de soustraire le blindé à la menace, notamment l’ATGM. C’est par exemple le but des brouilleurs tel que le brouilleur à EIREL ou des systèmes de fumigène comme la GALIX. Viennent ensuite les APS hard-kill, plus récent et encore peu répandu, qui ont pour mission d’intercepter et détruit le projectile qui menace le blindé. Le plus connu d’entre eux et le système israélien « Trophy ».
La protection idéale d’un blindé est donc d’éviter d’être touché grâce aux APS soft-kill puis hard-kill, puis, le cas échéant, d’encaisser la menace avec son blindage.
Le KBCM
Prototype KBCM
D’après le magasine RAIDS (Hors-série N° 5) le KBCM a été développé par GIAT (maintenant Nexter) et a d’abord été expérimenté sur un AMX-10 RC avant d’envisager son implémentation sur le char Leclerc. Ce prototype comportait un détecteur d’alerte laser, un détecteur ultraviolet de départ de missile et deux brouilleurs à éclats (des TShu russes issues du Shtora-1 pour le prototype).
Comme tous les systèmes de protection active (APS), le but du KBCM est d’améliorer la capacité de survie sur le champ de bataille des véhicules. Le KBCM est conçu dans l’idée de contrer les missiles antichars guida SACLOS (Semi-Automatic Command-to-Line Of Sight). Pour ce faire, il utilise deux détecteurs. Le premier est un détecteur d’alerte laser (LWS ou Laser Warning System) SAGEM et le second est un détecteur de départ de missile par ultraviolets DASA[1]. Lorsque la menace est détectée, la tourelle est orientée dans sa direction et les deux brouilleurs à éclats TShu viennent perturber les faisceaux qui permettent au poste de tir du missile de maintenir le guidage du missile antichar. Les TShu, issues du Shtora-1 russe, pratiquent un brouillage par émission continue d’impulsions codées dans l’infrarouge opérant dans la bande 0.7-2.7 μm. L’ensemble est aussi connecté au lanceur de grenades GALIX de Lacroix.
Le système était pensé pour être utilisé en mode Manuel, semi-automatique ou entièrement automatique. Dans le mode semi-automatique, le système propose les mesures à prendre et l’équipage décide. Dans le mode automatique, le système déclenche soit le brouilleur à éclat, soit le GALIX en fonction de la menace. Dans le mode manuel, l’équipage est simplement averti de la menace et de son type.

Le prototype du KBCM a été installé en 1999 sur un AMX-10 RC. Les deux brouilleurs à éclats TShu sont fixés dans un carénage qui est lui-même fixé de chaque côté du canon. Les détecteurs sont fixés au sommet de la tourelle au-dessus du canon de 105 mm.
Selon GIAT, l’une des évolutions potentielles d’un tel système était la mise réseau un réseau de plusieurs véhicules équipés de KBCM relié à un système de commandement et de contrôle de type FINDERS (Fast Information, Navigation, DEcision and Reporting System) afin de fournir une protection bien coordonnée à une unité blindée complète.
KBCM « AZUR »
Voici une vue d’artiste du KBCM telle que présentée sur certaines études et maquette du char Leclerc durant les années 2000-2010.
Les brouilleurs à éclats TShu sont remplacés par un composant semblable et plus compact dont je n’ai pas identifié le fabricant. L’ensemble du système est bien plus compact.

Les brouilleurs à éclats sont fixés de part et d’autre du canon sur la face avant de la tourelle. Le détecteur d’alerte laser est fixé au-dessus de canon. Les détecteurs de départ de missile par ultraviolets sont fixés sur les angles de la face avant de la tourelle pour pouvoir couvrir l’avant et le côté de la tourelle.
KBCM « Compact »
Il s’agit d’une version aperçue sur certaines études et maquettes de la tourelle T40 pour le char « Leclerc T40 ». L’ensemble des composants du KBCM est regroupé dans deux blocs asymétriques (ne me demandez pas pourquoi) fixés de part et d’autre du canon sur la face avant de la tourelle.

KBCM « Jaguar »
Il s’agit d’une vue d’artiste du bloc KBCM aperçue sur certains EBRC Jaguar. Il est monté sur la face avant de la tourelle à droite du canon de 40 mm. Sur l’EBRC Jaguar, le KBCM est associé au système de vision à 360° ANTARES (Thales), au Brouilleur Anti-IED Réactifs Actifs Goniométriques BARAGE (Thales), au détecteur acoustique de tir PILAR V (METRAVIB) et aux éternelles grenades GALIX (Lacroix).

L’ensemble permet, de manière semi-automatique ou entièrement automatisée, de détecter une menace et d’y réagir. Au-delà de l’utilisation du brouilleur à éclat ou des grenades GALIX, il est possible en un « clic » d’orienter immédiatement la tourelle dans la direction de la menace pour riposter.
KBCM « Evo »
Il s’agit d’une vue d’artiste du bloc KBCM aperçue sur le Leclerc « Evo » et l’EMBT-ADT 140, tous deux présentés par KNDS au salon Eurosatory 2024.

Sur les deux engins, le KBCM est directement encastré, dans des dispositions différentes, dans le blindage de la tourelle et est accompagné de l’antenne radar du système de protection active « Euro Trophy ».
Sources : RAIDS, Army Guide, Defense Update, Char Leclerc (Marc Chasillan), KNDS, European Defense Review
[1] Deutsche Aerospace Aktiengesellschaft est la société qui succéda au groupe aéronautique allemand Messerschmitt devenu MBB.

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