Opération HA, des renforts pour les Japonais à Guadalcanal

Extraits de « Un océan de feu : La guerre du pacifique 1941-1944 » — Joe Chevalier — BBG Publishing.

Opération HA

Après plusieurs revers cinglants subits par l’Armée impériale japonaise (Bataille de Tenaru, Bataille de la crête Edson…), la Marine impériale japonaise prépare une grosse opération aéronavale pour renforcer et réapprovisionner les troupes japonaises à Guadalcanal. En effet, les troupes sur place ne sont ravitaillées que par le Tōkyō Express, qui est insuffisant pour réapprovisionner les troupes et qui ne permet pas de transporter le matériel lourd. Du point de vue des conspirateurs de la faction Heiwa, il s’agit de joueur le jeu de l’Armée pour la voir se décribilisé et ainsi voir la marine reprendre les faveurs de l’Empereur et du Conseil suprême de guerre du Japon et quartier général impérial.

Conseil suprême de guerre du Japon et le quartier général impérial
Extraits Wikipédia
Le Conseil suprême de guerre du Japon date des premières années gouvernement de Meiji. Il reprend le modèle de l’état-major allemand avec un chef qui avait un accès direct à l’empereur et qui pouvait fonctionner indépendamment du ministère de l’armée et des fonctionnaires civils. Le quartier général impérial est un élément du conseil suprême de guerre établi en 1893 pour coordonner les efforts entre l’armée impériale japonaise et la marine impériale japonaise en temps de guerre. On peut le décrire comment étant un état-major interarmées comparable au JCS américain créé en 1949. À partir de novembre 1937 et sur les ordres de l’Empereur Showā, le conseil suprême de guerre est remplacé par le quartier général impérial et la conférence de liaison du gouvernement. Celle-ci avait pour but de permettre aux chefs de l’armée et de la Marine de s’entretenir plus étroitement avec le gouvernement, et d’aider à accorder les décisions et les besoins du quartier général impérial avec les ressources et les politiques du gouvernement. Les décisions finales de la conférence de liaison étaient officiellement communiquées et approuvées lors des conférences impériales que l’Empereur présidait lui-même au palais impérial de Tokyo.

L’opération est prévue pour la nuit du 15 au 16 septembre. Le Général Kiyotake Kawaguchi, qui commande les troupes japonaises à Guadalcanal, retarde son offensive contre les positions américaines afin d’utiliser les renforts et le matériel promis par l’IJN.

Le plan de la marine japonaise est simple, 25 transports lourdement escortés accosteront et déchargeront près du Cap Espérance pendant qu’une flotte de surface bombardera Henderson Field. Un autre groupe de combat engagera tout navire allié naviguant dans la zone. Cette partie de l’opération doit se dérouler de nuit. L’Amiral Yamamoto commandera un groupe aéronaval qui contournera « le slot[1] » pour engager les éventuels renforts américains.

Ordre de bataille japonais

Groupe de transport, commandé par le Contre-Amiral Takaji Joshima :

  • Les transports d’hydravions Chitose et Nisshin
  • Les destroyers Akizuki, Asagumo, Natsugumo, Yamagumo, Murakumo
  • 25 transports (17 500 hommes des 2ème et 38ème Divisions d’Infanterie, artillerie…)

Groupe de combat nocturne, commandé par le Vice-Amiral Aritomo Goto :

  • La 6ème Division de croiseurs composée de croiseurs Aoba, Kinugasa, Furutaka, Kako
  • Les Fubuki, Hatsuyuki, Shirayaki et Sagiri de la 11ème Division de Destroyers

Groupe de bombardement, commandé par le Vice-Amiral Nobutake Kondo :

  • La 4ème Division de croiseurs composée de l’Atago et du Takao
  • Le Myoko et le Maya de la 5ème Division de croiseurs
  • Un écran défensif composé du Croiseur léger Isuzu et les destroyers Naganami, Makinami, Takanami, Umikaze, Kawakaze, Suzukaze (commandé par le Contre-Amiral Raizo Tanaka)
  • Un groupe aérien composé des porte-avions Jun’yō (24 A6M Reisen, 21 D3A Kanbaku, 10 B5N Kankō) et Hiyō (22 A6M Reisen, 22 D3A Kanbaku, 10 B5N Kankō) escorté par les destroyers Kuroshio et Hayashio (le dispositif est commandé par le Contre-Amiral Kakuji Kakuta)

La Flotte combinée, commandée par l’Amiral Isoroku Yamamoto :

  • Le groupe de soutien du Vice-Amiral Takeo Kurita, composé des cuirassés Kongo et Haruna et des destroyers Oyashio, Kagero, Murasame, Samidare, Yudachi et Harusame
  • Le groupe aéronaval du Vice-Amiral Chuichi Nagumo composé des porte-avions Shokaku (18 A6M Reisen, 20 D3A Kanbaku, 23 B5N Kankō), Zuikaku (27 A6M Reisen, 27 D3A Kanbaku, 18 B5N Kankō) et Zuihō (18 A6M Reisen, 6 B5N Kankō), le croiseur Kumano et les destroyers Amatsukaze, Hatsukaze, Tokitsukaze, Yukikaze, Arashi, Maikaze, Teruzuki et Hamakaze
  • Le groupe d’avant-garde du Contre-Amiral Hiroaki Abe composé des cuirassés Hiei et Kirishima, les croiseurs Tone, Chikuma et Suzuya commandés par le Contre-Amiral Chuichi Hara
  • Un écran composé des destroyers Kazagumo, Mikigumo, Yugumo, Akigumo, Tanikaze, Urakaze et Isokaze commandés par le Contre-Amiral Susumu Kimura.
  • Les 25ème et 26ème Flottes aériennes du Vice-Amiral Junichi Kusaka basé à Rabaul (67 A6M Reisen, 67 G4M Hamaki, 27 D3A Kanbaku)

Ordre de bataille américain

Task Force 64 commandée par le Contre-Amiral Norman Scott :

Les croiseurs San Francisco et Salt Lake City, les croiseurs légers Boise et Helena, les destroyers Farenholt, Buchanan, Laffey, Duncan et MacCalla.

Initialement, seule la Task Force 64 de Scott se trouvait aux abords de Guadalcanal. Dès que les éléments japonais ont été repérés, les Task Forces 16 et 17 de Kinkaid et Murray sont envoyées au secours de Scott.

Task Force 16 commandée par le Contre-Amiral Thomas Kinkaid :

  • Le porte-avions Enterprise (13 TBF-1 Avenger, 34 F4F Wildcats, 36 SBD-3 Dauntless) et le cuirassé South Dakota.
  • L’écran mené par le Contre-Amiral Tisdale est composé du croiseur Portland, du croiseur antiaérien San Juan et des destroyers Porter, Mahan, Cushing, Preston, Smith, Maury, Conyngham et Shaw.

Task Force 17 commandée par le Contre-Amiral George Murray :

  • Le porte-avions Hornet (16 TBF-1 Avenger, 36 F4F Wildcats, 36 SBD-3 Dauntless).
  • L’écran est composé des croiseurs Northampton et Pensacola, des croiseurs antiaériens San Diego et Juneau, des destroyers Morris, Anderson, Hughes, Mustin, Russell et Barton. Ce dispositif est commandé par le Contre-Amiral Good.

Le groupe aérien d’Henderson Field :

  • 26 F4F-4 Wildcats
  • 6 P-400
  • 6 P39 Airacobra
  • 20 SBD Dauntless
  • 2 TBF Avengers.

Prélude

Au moment de lancer cette opération, les Japonais utilisent un nouveau cryptage pour leur communication, le JN-41 aussi connut sous le nom « Code Kaze ». Cette décision a été prise à la demande de l’Amiral Yamamoto dans les jours qui ont suivi la bataille de Midway, il lui paraissait évident que les Américains avaient percé le code JN-25. Le JN-41 n’a plus grand-chose de commun avec les codes JN-25, 39 et 40, car ces trois codes sont très similaires, le risque qu’il soit rapidement « cassé » était donc élevé. De plus, les Japonais supposent que même sans déchiffrer l’ensemble des messages les Américains sont capables de localiser leurs provenances et destinations. Dès lors, les Japonais font preuve d’une grande prudence dans leur communication et n’hésitent pas à transmettre certains messages capitaux par avion.

Le 15 septembre, alors que les navires japonais quittent Rabaul, Papouasie–Nouvelle-Guinée, afin d’atteindre Guadalcanal de nuit. Le même jour, le porte-avions USS Wasp est coulé par le sous-marin japonais I-19 au sud-ouest de Guadalcanal. Le Wasp escortait un convoi de ravitaillement allié.

L’USS Wasp coule pendant que son équipage évacue.

Débarquement des renforts japonais

La météo n’étant pas très bonne, les opérations aériennes étaient assez limitées cette semaine. Toutefois, Américains et Japonais lancent des reconnaissances toute la journée. Les reconnaissances japonaises découvrent qu’aucune flotte alliée n’est dans la zone. Les appareils de reconnaissance alliés repérèrent le convoi de ravitaillement à 340 km au nord de Guadalcanal entre les îles de Kolombangara et de Choiseul à 15 h 45.

L’alerte est donnée, la Task Force 64 de Scott qui est au sud de Guadalcanal se met en route et les Task Forces 16 et 17 qui étaient à Nouméa appareillent en urgence, mais ne seront pas là avant le lendemain. En attendant, les avions d’Henderson Field décollent massivement pour attaquer en force les Japonais avant le coucher du soleil.

Alors que les Japonais semblaient venir tout droit sur Guadalcanal, la Flotte combinée et ses porte-avions décrochent vers le Nord pour contourner l’île de Malaita dans la nuit et surgir entre Guadalcanal et San Cristobal au lever du jour afin de surprendre d’éventuels renforts américains. À 18 h 6, les navires japonais qui se dirigent vers Guadalcanal sont attaqués par la Cactus Airforce. Le raid est bref, mais les bombardiers SBD Dauntless américains endommagent trois transports. Les Américains perdent deux avions face à la DCA et aux Reisen japonais. De retour à Henderson Field, les Américains annoncent que le grand groupe aéronaval aperçu par les appareils de reconnaissance n’est plus là. Le reste des avions japonais du Vice-Amiral Kondo a décollé juste après le raid américain. Au coucher du soleil, Henderson Field est attaquée par 35 bombardiers en piqué D3A escorté par 26 A6M Reisen. Les Américains font décoller un maximum d’appareils en urgence à la fois pour se défendre, mais aussi pour limiter le nombre appareils détruits au sol. Les chasseurs des deux camps se lancent dans un combat féroce. Les Japonais perdent six chasseurs contre quatre pour les Américains. Les bombardiers en piqué japonais larguent leurs bombes, mais sont gênés à la fois par la DCA et par la baisse de visibilité causée par le soleil couchant. Les bombardiers japonais perdront cinq des leurs face à la DCA et la chasse américaine. Trois appareils américains sont détruits au sol, la piste d’Henderson Field bien qu’endommagée pourra être réparée rapidement et ses avions peuvent si poser tant bien que mal, deux hangars ont été détruits ainsi que deux dépôts de carburant. L’un d’entre eux l’a sûrement été de manière accidentelle par une « bombe perdue » puisqu’il était caché dans la jungle à proximité de la base américaine. L’incendie se répand à la végétation voisine et les Américains ne parviendront pas à l’éteindre, car la priorité est donnée aux installations d’Henderson Field. Les flammes feront un bon repère nocturne pour les Japonais. Un autre D3A japonais sera perdu en ratant son appontage sur le Jun’yō.

À 22 h, les Japonais sont aux Cap Espérance, les 25 transports se positionnent à Kamimbo Bay pour décharger troupes et matériels. Le reste de la flotte de Joshima se place en position défensive. Pendant ce temps, Goto et Kondo poursuivent au sud avec pour objectif le bombardement d’Henderson Field et l’attaque d’éventuels navires alliés. Seuls les porte-avions de Kakuta et leur escorte décrochent par le Nord-est pour rejoindre la Flotte combinée.

La bataille navale du Cap Espérance

Avec la séparation des forces japonaises, Scott pense pouvoir les repousser pendant la nuit et passer le relais aux Task Forces 16 et 17 le lendemain. Le plan de Scott est simple : ses navires avanceront en colonne avec ses destroyers à l’avant et à l’arrière et ses croiseurs au milieu. Les destroyers doivent illuminer les cibles avec des projecteurs et lancer leurs torpilles tandis que les croiseurs ont l’ordre d’ouvrir le feu sur toutes les cibles sans attendre les ordres. Les appareils de reconnaissance embarqués à bord des croiseurs, lancés avant la bataille, doivent repérer les navires japonais et transmettre leur position. Même si l’USS Helena et l’USS Boise embarquent le nouveau radar SG plus efficace, Scott choisit l’USS San Francisco comme navire amiral.

La Task Force 64 du Contre-Amiral Scott se dirige vers le Cap Espérance.

À 22 h, alors que les navires de Scott approchent du cap Hunter au Nord-ouest de Guadalcanal, trois de ses croiseurs lancent des hydravions. L’un d’eux s’écrase au décollage, mais les deux autres patrouillent au-dessus des îles de Savo et de Guadalacanal. Au moment du lancement des hydravions, la flotte japonaise atteint juste la pointe montagneuse du Nord-ouest de Guadalcanal et aucune des deux flottes ne réalise la présence de l’autre. À 22 h 20, Kondo contacte Goto et lui dit qu’aucun navire américain ne se trouve dans la zone. Néanmoins, les navires de Joshima entendent les hydravions de Scott au-dessus d’eux pendant qu’ils déchargent leur ravitaillement. Joshima ne parvient pas à prévenir Goto et Kondo.

À 22 h 33, juste après avoir atteint le cap Espérance, les navires de Scott passent en formation de combat. La colonne est menée par l’USS Farenholt, l’USS Duncan, l’USS Laffey suivis par les croiseurs USS San Francisco, USS Boise, USS Salt Lake City et l’USS Helena. Les destroyers USS Buchanan et USS McCalla forment l’arrière de la colonne. Les navires sont espacés d’environ 460 à 640 mètres et la visibilité est faible, car la lune n’est pas visible.

Les flottes de Goto et Kondo affrontent plusieurs grains durant leur approche de Guadalcanal. Le navire amiral de Goto, l’Aoba mène la colonne des croiseurs japonais qui sont suivis par le Furutaka et le Kinugasa. Le destroyer Fubuki est à tribord de l’Aoba et l’Hatsuyuki se trouve à bâbord. À 23 h 30, les navires de Goto émergent du dernier grain et apparaissent sur les écrans radars de l’USS Helena et de l’USS Salt Lake City. Comme les navires japonais ne sont pas équipés de radars, ils ne repèrent pas la flotte américaine.

À 23 h, l’hydravion de l’USS San Francisco repère les navires japonais au large de Guadalcanal et rapporte leur position à Scott. Ce dernier, considérant que d’autres navires japonais sont probablement toujours en route, maintient son cap vers l’ouest de l’île de Savo. À 23 h 33, Scott ordonne à sa colonne de mettre le cap au Sud-ouest. Tous les navires américains comprennent l’ordre comme étant un mouvement de colonne à l’exception du propre navire de Scott, l’USS San Francisco. Alors que le premier destroyer de tête exécute le mouvement de colonne, l’USS San Francisco vire simultanément de bord. L’USS Boise, derrière lui, suit immédiatement la manœuvre et les trois destroyers de tête se retrouvent à l’écart de la formation.

À 23 h 32, le radar de l’USS Helena montre les navires japonais à environ 25 km. À 23 h 35, les radars de l’USS Boise et de l’USS Duncan repèrent à leur tour les navires japonais. Entre 23 h 42 et 23 h 44, les deux navires rapportent leurs observations à Scott qui croit à tort que les deux croiseurs ont repéré les trois destroyers américains chassés de la formation par le mouvement de colonne. Scott demande par radio à l’USS Farenholt s’il tente de retrouver sa position à la tête de la colonne. L’USS Farenholt répond, « Affirmatif, arrivons sur votre tribord », ce qui confirme l’intuition de Scott selon laquelle les radars suivaient ses propres destroyers.

À 23 h 45, l’USS Farenholt et l’USS Laffey ignorant toujours l’approche des navires de Goto augmentent leur vitesse pour revenir à l’avant de la colonne américaine. L’équipage de l’USS Duncan, pensant cependant que les deux destroyers commencent leur attaque des navires japonais, accroît sa vitesse pour lancer une torpille contre les navires japonais sans en informer Scott. Le radar de l’USS San Francisco repère les Japonais, mais Scott n’en est pas informé. À 23 h 45, les bâtiments japonais se trouvent à seulement 4 600 m de la formation américaine et sont repérés par les vigies de l’USS Helena et l’USS Salt Lake City. La formation américaine se trouve à ce moment capable de barrer le T à la flotte japonaise et a donc un avantage tactique important. À 23 h 46, supposant toujours que Scott est au courant de l’approche rapide des navires japonais, l’USS Helena demande la permission d’ouvrir le feu avec la procédure, Interrogatory Roger, signifiant « sommes-nous autorisés à agir ? » Scott répond par Roger, signifiant uniquement, pour lui, que le message avait été reçu, pas qu’il accordait l’autorisation d’agir. Ayant reçu cette réponse, l’USS Helena considère qu’il a la permission d’agir et ouvre le feu avant d’être rapidement suivi par l’USS Boise, l’USS Salt Lake City et, à la surprise de Scott, par l’USS San Francisco.

Les navires de Goto sont pris par surprise. À 23 h 43, les vigies de l’Aoba ont repéré la flotte de Scott, mais Goto suppose qu’il s’agit des navires de Kondo. Deux minutes plus tard, les vigies rapportent que les navires sont américains, mais Goto reste sceptique et ordonne à ses navires d’émettre des signaux d’identification. Alors que l’équipage commence à exécuter l’ordre, les premiers obus américains touchent la superstructure de l’Aoba. Le croiseur japonais est rapidement touché par une quarantaine d’obus de l’USS Helena, l’USS Salt Lake City, l’USS San Francisco, l’USS Farenholt et l’USS Laffey. Les projectiles endommagent sévèrement les systèmes de communication de l’Aoba et démolissent deux de ses principales tourelles ainsi que les organes de visée. Plusieurs obus de gros calibre traversent la passerelle de l’Aoba sans exploser, mais le souffle tue de nombreux marins et blesse mortellement Goto.

Scott, toujours pas convaincu de l’identité des navires visés et craignant de toucher ses propres destroyers, ordonne l’arrêt des tirs à 23 h 47 même si tous les navires ne respectent pas l’ordre. Scott demande à l’USS Farenholt d’émettre ses signaux d’identification et lorsque Scott voit que le navire était proche de sa formation, il autorise la reprise des tirs à 23 h 51.

L’Aoba, continuant de recevoir des obus, vire sur tribord pour avancer sur la formation de Scott et commence à déployer un écran de fumée qui convainc la plupart des navires américains qu’il était en train de couler. Les navires américains orientent alors leurs tirs sur le Furutaka qui suivait l’Aoba. À 23 h 49, le tube lance-torpilles du Furutaka est touché et l’incendie qui se déclare attire encore plus de projectiles américains. À 23 h 58, une torpille lancée par l’USS Buchanan percute le Furutaka dans sa salle des machines avant et cause de graves dégâts. Dans le même temps, l’USS San Francisco et l’USS Boise repérèrent le Fubuki à environ 1 300 m et ouvrent le feu sur lui. La plupart des autres navires américains font de même et, lourdement endommagé, le Fubuki commence à couler. Le Kinugasa et le Hatsuyuki virent sur bâbord au lieu de tribord et échappent à l’attention immédiate des navires de Scott.

Durant l’échange de tir, l’USS Farenholt est touché à plusieurs reprises par des tirs américains et japonais qui tuent plusieurs hommes. Il échappe aux tirs croisés en passant devant l’USS San Francisco et en arrivant sur le flanc dégagé de la colonne de Scott. L’USS Duncan, toujours engagé dans son attaque à la torpille est également touché par les tirs croisés, il prend feu et essaye en vain de s’extraire de la zone des tirs.

Alors que les navires japonais tentent de s’échapper, la flotte de Scott resserre sa formation pour poursuivre les navires de Goto en retraite. À 0 h 6, deux torpilles du Kinugasa manquent de justesse l’USS Boise. Ce dernier et l’USS Salt Lake City orientent leurs projecteurs pour aider au ciblage des navires japonais, ce qui offre une cible parfaite pour les artilleurs du Kinugasa. À 0 h 10, deux obus touchent les magasins de munitions de l’USS Boise entre les tourelles n° 1 et n° 2. L’explosion qui suit tue près de 100 hommes et manque de briser le navire en deux. L’eau de mer s’engouffre dans les brèches de la coque et aide à éteindre l’incendie avant que celui-ci ne fasse exploser le reste des munitions. L’USS Boise fait immédiatement une embardée pour sortir de la colonne et quitter l’affrontement. Le Kinugasa et l’USS Salt Lake City échangent des tirs ; le premier est légèrement endommagé et le second est touché au niveau de ses chaudières, ce qui réduit sa vitesse.

À 0 h 16, Scott ordonne à ses navires de mettre le cap au nord-ouest pour essayer de poursuivre les navires japonais en retraite. Les navires de Goto disparaissent rapidement et tous les tirs cessent vers 0 h 20. La formation américaine commence à se déliter et Scott met alors le cap au sud-ouest pour quitter la zone des combats.

Durant le combat entre les navires de Scott et de Goto, le groupe de ravitaillement de Joshima a poursuivi le déchargement. Malgré ses dégâts sévères, l’Aoba parvient à rejoindre le Kinugasa et à se retirer vers le Nord dans le détroit de Nouvelle-Géorgie. La salle des machines du Furutaka est très endommagée et le navire s’arrête à 0 h 50 avant de couler à 2 h 28 à 35 km au Nord-ouest de l’île de Savo. L’Hatsuyuki récupère les survivants du croiseur et poursuit sa retraite vers le Nord.

L’USS Boise parvient à éteindre les incendies vers 2 h 40 et à rejoindre la formation de Scott à 3 h 5. Ravagé par les flammes, l’USS Duncan est abandonné par son équipage à 2 h. Ignorant le sort de l’USS Duncan, Scott détache l’USS McCalla pour le retrouver et le ramener à Nouméa. L’USS McCalla localise le destroyer en feu et abandonné vers 3 h, plusieurs marins tentent de le maintenir à flot, mais le navire coulera finalement le lendemain midi à 10 km au nord de l’île de Savo. Les survivants de l’USS Duncan sont secourus par l’USS McCalla et par des embarcations déployées depuis Guadalcanal. Alors qu’ils secourent les marins de l’USS Duncan, les Américains arrivent à proximité de la centaine de survivants du Fubuki qui flottaient dans la même zone. Les Japonais refusent initialement d’être secourus, mais accepteront finalement le lendemain.

Pendant l’affrontement, la flotte de Kondo n’est pas intervenue et s’est glissée entre la flotte de Scott et la côte est de Guadalcanal. Les navires américains ne repèrent pas les Japonais et s’éloignent au Sud-est.

Bombardement maritime d’Henderson Field

À 3 h 33, les croiseurs lourds Atago, Takao, Myoko et Maya, escortés par un croiseur léger et six destroyers, atteignent Guadalcanal et ouvrent le feu sur l’aérodrome à une distance de 16 km. Durant une heure et vingt-trois minutes, les quatre croiseurs tirent plus de 1900 obus sur le périmètre de Lunga, la plupart s’abattant à proximité et dans un carré de 2 195 m autour de l’aérodrome. Un grand nombre de ces projectiles sont des obus à fragmentation, spécialement conçus pour détruire des cibles à terre. Le bombardement endommage lourdement les deux pistes principales, incendie presque tout le carburant d’aviation disponible, détruisant 48 des 90 appareils de la Cactus Air Force et faisant 41 morts, dont 6 pilotes.

Bombardement japonais d’Henderson Field.

En dépit des dommages très importants, le personnel de la base Henderson est en mesure de rendre une piste opérationnelle en quelques heures. Dans le même temps, dix-sept appareils de modèle SBD et vingt Wildcats de la base d’Espiritu Santo vont être rapidement envoyés à Henderson Field tandis que les avions de transport de l’US Army et des Marines se préparent pour acheminer du carburant à partir d’Espiritu Santo. Utilisant du carburant siphonné des avions détruits ainsi qu’un stock qui avait été caché dans la jungle à proximité, la Cactus Air Force attaque le convoi juste avant le lever du soleil surprenant ainsi les Japonais. Les Japonais qui avaient presque fini leur opération voient trois de leurs transports être gravement endommagés. Les trois navires en question vont s’échouer dans la baie et parviendront à être déchargés le lendemain par les troupes de l’Armée. Les appareils américains n’essuient aucune perte.

La bataille aéronavale de San Cristobal

Bien que Yamamoto soit à la tête de l’opération japonaise, le commandement du groupe aéronaval a été confié à Chuichi Nagumo. Yamamoto lui offre ainsi une deuxième chance après l’échec de Midway. Nagumo a pour consigne de couler les porte-avions américains, mais la priorité est de préserver les forces aéronavales japonaises avant tout.

Avant le lever du soleil, les flottes de Kondo et Goto se regroupent au cap Espérance pour couvrir la fin de l’opération de débarquement de Joshima. Ils ne seront pas inquiétés, car les avions d’Henderson Field n’ont plus de carburant.

À 2 h 50 le 16 septembre, les forces aéronavales japonaises quittent Malaita alors que les renforts américains partis de Nouméa la veille sont au large de l’île Rennell. Les deux flottes se rapprochent jusqu’à ce qu’elles soient à environ 250 km l’une de l’autre vers 5 h du matin. Les deux camps lancent leurs appareils de reconnaissance et préparent leurs avions d’attaque pour pouvoir les engager dès que la flotte ennemie sera repérée. Un Catalina américain équipé d’un radar repère les porte-avions japonais à 3 h 10, mais Kinkaid ne reçoit ce rapport qu’à 5 h 2. Par conséquent, considérant que les navires japonais ont changé de position durant les deux heures, l’amiral américain décide de garder ses appareils en réserve jusqu’à obtenir des renseignements plus précis.

La Flotte combinée quitte la zone de Malaita.

À 6 h 45, un appareil de reconnaissance américain repère les porte-avions de la flotte principale de Nagumo. À 6 h 58, un avion de reconnaissance japonais repère le groupe opérationnel du porte-avions USS Hornet. Les deux camps se dépêchent de lancer leurs appareils pour être les premiers à frapper l’adversaire. Les Japonais sont les plus rapides et font décoller 64 appareils dont 21 bombardiers en piqué Aichi D3A, 20 bombardiers-torpilleurs Nakajima B5N2, 21 chasseurs A6M3 Reisen et 2 Nakajima B5N2 de commandement qui se mettent en route vers l’USS Hornet à 7 h 40. Au même moment, deux appareils de reconnaissance SBD-3 Dauntless approchent du lieu où ont été repérés les porte-avions japonais et plongent sur le Zuiho. Les chasseurs de protection japonais étant occupés à poursuivre les autres appareils de reconnaissance américains, les deux avions parviennent à larguer leurs bombes qui endommagent sévèrement le pont d’envol et le porte-avions est incapable de récupérer ses appareils.

Dans le même temps, Kondo ordonne à l’avant-garde d’Abe de foncer pour essayer d’engager au canon les navires américains. Le japonais décide également de lancer sa force avancée à pleine vitesse pour que les appareils du Jun’yō et du Hiyō puissent participer à l’attaque. À 8 h 10, le Shokaku lance une seconde vague avec 19 bombardiers en piqué et 8 Reisen et le Zuikaku fait décoller 16 bombardiers-torpilleurs à 8 h 40. Ainsi, à 9 h 10, les Japonais ont plus de 110 appareils en vol vers les porte-avions américains.

Les appareils américains décollent vingt minutes après les Japonais. Considérant qu’une attaque rapide était plus importante qu’une attaque groupée, les appareils américains forment des petits groupes et se mettent en route vers les navires japonais. La première escadrille de l’USS Hornet comprend 15 bombardiers en piqué SBD, 6 bombardiers-torpilleurs TBF-1 Avenger, 8 chasseurs F4F4 Wildcat et se met en route à 8 h. Un second groupe constitué de 3 SBD, 7 TBF et 8 Wildcats de l’USS Enterprise décolle à 8 h 10. Un troisième groupe de 9 SBD, 8 TBF et 7 Wildcats de l’USS Hornet se met en route à 8 h 20.

À 8 h 40, les deux formations aériennes adverses passent à proximité l’une de l’autre. Neuf Reisen du Zuihō attaquent le groupe de l’USS Enterprise. Au cours de l’affrontement, 4 Reisen, 3 Wildcats et 2 TBF sont abattus tandis que 2 autres TBF et 1 Wildcat sont sévèrement endommagés et font demi-tour.

À 8 h 50, la première formation américaine de l’USS Hornet repère 4 navires de la force avancée d’Abe. Ne s’arrêtant pas, les appareils américains localisent les porte-avions japonais et se préparent à attaquer. Trois Reisen du Zuihō attaquent les Wildcats de la formation et les éloignent des bombardiers qu’ils doivent protéger. Par conséquent, les bombardiers en piqué du premier groupe commencent leurs attaques sans escorte. Vingt Reisen chargés de la défense des porte-avions engagent la formation des Américaines et en abattent quatre SBD. Les onze restants plongent sur le Shokaku à 9 h 27 et entre trois et six bombes percutent le navire, endommageant sévèrement le pont d’envol et en causant de gros dégâts dans les ponts inférieurs. Le dernier SBD de la formation bombarde le destroyer japonais Teruzuki qui est légèrement endommagé. Les six TBF du premier groupe d’attaque distancé par les autres appareils ne parviennent pas à repérer les porte-avions japonais et retournent à leur groupe aéronaval. Sur le chemin du retour, ils attaquent le croiseur lourd Tone, mais aucune torpille ne touche sa cible.

SBD Dauntless passant au-dessus de l’avant-garde japonaise.

Les TBF Avenger du second groupe d’attaque provenant de l’USS Enterprise sont incapables de localiser les porte-avions japonais et se rabattent sur le croiseur lourd Suzuya de l’avant-garde d’Abe. Le croiseur japonais s’en tire sans subir de dégâts. Presque au même moment, la troisième escadrille américaine de l’USS Hornet repère les navires d’Abe et attaque le croiseur lourd Chikuma. Le navire est touché par deux bombes de 1 000 livres et est sévèrement endommagé. Trois SBD de l’USS Enterprise arrivent peu après et le Chikuma est à nouveau endommagé par un impact direct et l’explosion de deux bombes à proximité. Finalement, huit TBF du troisième groupe bombardent le Chikuma en feu qui est à nouveau touché par une bombe. Le croiseur, escorté par deux destroyers, quitte la zone et met le cap sur Truk pour y être réparé.

La Flotte combinée en pleine manœuvre d’évitement.

À 8 h 30, les porte-avions américains apprennent par leurs escadrilles en vol qu’une formation de bombardement japonaise progresse dans leur direction. Le commandant de l’escadrille japonaise repère le groupe aéronaval de l’USS Hornet, alors que celui de l’USS Enterprise est dissimulé par un grain, et il déploie ses appareils pour l’attaque. À 8 h 55, les radars des porte-avions détectent les avions en approche à environ 65 km et ils orientent les 37 Wildcats de leur escorte pour les engager. Des problèmes de communications, des erreurs commises par les contrôleurs de vol et les procédures primitives empêchent cependant tous les chasseurs d’attaquer les appareils japonais avant qu’ils ne passent à l’action contre l’USS Hornet. Bien que plusieurs bombardiers japonais soient abattus, la plupart d’entre eux commencent leur attaque sans opposition.

À 9 h 9, les canons antiaériens de l’USS Hornet et de ses navires d’escorte ouvrent le feu alors que les 20 bombardiers-torpilleurs et les 16 bombardiers en piqué commencent leurs attaques sur le porte-avions. À 9 h 12, une bombe de 250 kg tombe en plein milieu du pont d’envol et traverse trois ponts avant d’exploser en tuant 60 hommes. Quelques instants plus tard, une bombe percute le pont d’envol en créant un trou de 3,4 m de diamètre et tuant 30 hommes. Environ une minute plus tard, une troisième bombe tombe près du lieu d’impact de la première bombe, traverse 3 ponts avant d’exploser en causant de gros dégâts, mais sans faire de victimes. À 9 h 14, un bombardier en piqué est touché par un obus antiaérien juste au-dessus de l’USS Hornet. L’appareil endommagé s’écrase sur la cheminée du porte-avions et répand du carburant en feu sur l’ensemble de l’îlot.

Au moment de l’attaque des bombardiers en piqué, les bombardiers-torpilleurs approchent également l’USS Hornet de deux directions. Malgré le tir nourri des défenses antiaériennes qui détruit plusieurs appareils, le porte-avions est touché par deux torpilles entre 9 h 13 et 9 h 17 qui détruisent la propulsion du navire. Alors que l’USS Hornet s’arrête, un bombardier en piqué japonais endommagé s’écrase délibérément sur le flanc du porte-avions et cela provoque un incendie près du principal réservoir de carburant d’aviation. À 9 h 20, lorsque le dernier appareil japonais quitte la zone, l’USS Hornet est immobilisé et en feu. 25 appareils japonais et 6 avions américains sont détruits lors de cette première attaque contre l’USS Hornet.

L’USS Hornet en feu, percuté par deux torpilles japonaises.

Avec l’aide des canons à eau de trois destroyers d’escorte, les incendies sur le porte-avions sont maîtrisés vers 10 h. Les blessés sont évacués et le croiseur USS Northampton entreprend de remorquer le navire à l’écart de la zone des combats. L’installation du câble de remorquage prend cependant un certain temps et de nouveaux appareils japonais sont en approche.

À partir de 9 h 30, l’USS Enterprise récupère la majorité des chasseurs endommagés et à court de carburant de la couverture aérienne ainsi que les appareils de reconnaissance des deux porte-avions. Cependant, comme son pont d’envol est surchargé d’avions et qu’une seconde vague d’attaque japonaise est en approche, l’USS Enterprise cesse les opérations d’atterrissage à 10 h. Les avions à court de carburant sont forcés d’amerrir et les destroyers récupèrent les pilotes. L’un de ces appareils, un TBF de l’USS Enterprise endommagé lors de l’affrontement avec les Reisen du Zuihō, amerrit à proximité du destroyer USS Porter. Alors que le navire secourt l’équipage de l’appareil, la torpille de l’avion se met en marche et commence à tourner en rond avant de percuter l’USS Porter en tuant 15 marins. Les dégâts étant très importants le navire est évacué vers le destroyer USS Shaw qui détruit ensuite l’USS Porter au canon.

Alors que les appareils de la première vague japonaise commencent à retourner vers leur flotte après leur attaque de l’USS Hornet, l’un d’eux repère l’USS Enterprise et transmet sa position. La seconde vague japonaise, considérant que l’USS Hornet est en train de couler, oriente alors son attaque sur le second groupe aéronaval à 10 h 8. À nouveau, les appareils de la couverture aérienne américaine ont du mal à intercepter les avions japonais et ne détruisent que 2 des 19 bombardiers en piqué avant qu’ils ne commencent leur attaque. Malgré l’intense défense antiaérienne, deux bombes de 250 kg touchent le navire et une autre tombe juste à côté. Les dégâts sont importants et l’ascenseur avant du porte-avions est bloqué en position haute. 12 des 19 bombardiers sont détruits lors de cette attaque.

Vingt minutes plus tard, les 16 bombardiers-torpilleurs du Zuikaku arrivent sur place et se divisent en 2 groupes. L’une de ces formations est attaquée par 2 Wildcats qui détruisent 3 appareils et en endommagent un quatrième. En feu, ce dernier s’écrase volontairement sur le destroyer Smith en tuant 57 marins et en provoquant un incendie. Le destroyer passe dans le sillage du cuirassé USS South Dakota pour aider à l’extinction des incendies avant de reprendre sa position et de tirer avec ses canons restants sur les bombardiers-torpilleurs qui poursuivent leur attaque.

Les autres bombardiers-torpilleurs attaquent l’USS Enterprise, l’USS South Dakota et le croiseur USS Portland, mais toutes leurs torpilles manquent leur cible ou n’explosent pas à l’exception de trois dont deux touchent l’USS South Dakota et l’USS Enterprise. L’affrontement se termine à 10 h 53 et 9 des 16 bombardiers-torpilleurs japonais ont été abattus. Après avoir circonscrit la plupart des incendies, l’USS Enterprise reprend ses opérations d’appontage à 11 h 15 pour récupérer les appareils revenant de leur attaque contre les navires japonais. Néanmoins, seuls quelques avions se posent avant qu’une nouvelle vague japonaise n’interrompe les opérations.

Les avions japonais attaquent l’USS Enterprise, sans succès.

Entre 9 h 5 et 9 h 14, le Jun’yō est arrivé à moins de 220 km des porte-avions américains et il lance 17 bombardiers en piqué et 12 Reisen. À 11 h 21, ces appareils plongent sur l’USS Enterprise. Une bombe tombe à proximité du navire et cause de nouveaux dégâts tandis que l’USS South Dakota et le croiseur USS San Juan sont également attaqués et subissent des dégâts modérés. 11 des 17 bombardiers en piqué japonais sont abattus lors de l’attaque.

À 11 h 35, Kinkaid décide de retirer l’USS Enterprise et ses navires d’escorte du champ de bataille, car il est trop endommagé et que l’USS Hornet est hors de combat. De plus, il suppose que les Japonais ont encore 1 ou 2 porte-avions indemnes dans la zone. Il ordonne au groupe de l’USS Hornet de faire de même dès que possible. Entre 11 h 39 et 13 h 32, l’USS Enterprise récupère 57 des 73 appareils américains en vol alors qu’il quitte la zone de l’affrontement. Les autres avions amerrissent et leurs équipages sont secourus par les navires d’escorte.

Entre 11 h 40 et 14 h, le Zuikaku, le Hiyō et le Jun’yō récupèrent les quelques appareils revenant de leurs attaques et préparent le décollage de nouvelles vagues. L’officier d’appontage du Jun’yō décrit le retour des appareils de la première vague : « Nous scrutions le ciel avec appréhension. Il n’y avait que quelques appareils en l’air en comparaison du nombre qui avait décollé quelques heures auparavant… Les avions vacillaient et chancelaient sur le pont, chaque chasseur et bombardier était criblé d’impact… Alors que les pilotes quittaient péniblement leurs étroits cockpits, ils parlaient d’une opposition incroyable, d’un ciel rempli d’éclats d’obus antiaériens et de balles traçantes. Le seul chef d’escadrille du Jun’yō à revenir semblait si secoué qu’il lui arrivait parfois de parler de façon incohérente ».

À 13 h, la force avancée de Kondo et l’avant-garde d’Abe se rassemblent pour avancer directement sur la dernière position connue des porte-avions américains et essayer de les engager au canon. Le Zuihō et le Shokaku se retirent du champ de bataille et Nagumo laisse le contre-amiral Kakuji Kakuta avec la responsabilité du Zuikaku, du Hiyō et du Jun’yō. À 13 h 6, le Jun’yō et le Hiyō lancent leur seconde vague de 15 bombardiers-torpilleurs et de 17 Reisen tandis que le Zuikaku fait décoller sa troisième vague de 7 bombardiers-torpilleurs, de 2 bombardiers en piqué et de 5 Reisen. À 15 h 35, le Jun’yō lance la dernière escadrille de la journée composée de 4 bombardiers et 6 Reisen.

Après plusieurs problèmes techniques, l’USS Northampton commence à remorquer lentement l’USS Hornet à 14 h 45 dont l’équipage est sur le point de restaurer une partie de la propulsion. L’USS San Juan, bien qu’endommagée, couvre l’opération. La seconde vague du Jun’yō et du Hiyō arrive à 15 h 20 et elle attaque le porte-avions presque immobile. À 15 h 23, une torpille percute l’USS Hornet et détruit les réparations réalisées sur le système de propulsion. L’eau commence à s’engouffrer et le navire prend rapidement 14° de gîte. Sans électricité pour pomper l’eau, l’USS Hornet est considéré comme perdu et l’équipage abandonne le navire. L’USS Northampton est touché par une torpille et cinq bombes, un incendie incontrôlable ravage le navire et atteint rapidement les soutes de munitions. À 15 h 35, le Northampton est brisé en deux par l’explosion de ses munitions, ne laissant que quelques survivants. La troisième vague du Zuikaku attaque à ce moment et une nouvelle bombe percute l’USS Hornet. L’ensemble de l’équipage est évacué à 16 h 27 et la dernière attaque japonaise de la journée largue une bombe supplémentaire sur le porte-avions en train de couler à 17 h 20. L’USS San Juan est touché par deux torpilles et trois bombes, ravagées par les flammes, sans propulsion ni électricité, le croiseur antiaérien est abandonné à 15 h 42.

Les destroyers USS Mustin et USS Anderson reçoivent l’ordre de saborder l’USS Hornet et l’USS San Juan tandis que le reste des navires américains se retire vers le sud-est pour échapper à la flotte japonaise en approche. Les navires japonais ne se trouvant plus qu’à quelques dizaines de kilomètres, les deux destroyers américains abandonnent la coque en feu de l’USS Hornet à 20 h 40. Quand les flottes de Kondo et d’Abe arrivent à proximité de l’USS Hornet à 22 h 20, ils jugent qu’il est trop endommagé et n’essayent pas de le capturer. Avec deux torpilles de 610 mm, destroyers Akigumo et Makigumo achèvent le porte-avions américain qui finit par couler à 1 h 35 le matin du 17 octobre 1942. Le San Juan est achevé lui aussi, une torpille suffit à le couler. Plusieurs attaques nocturnes par des Catalina équipées de radars sur le Jun’yō et le Teruzuki, l’avance prise par les Américains dans leur retraite et le manque de carburant ont apparemment poussé les Japonais à ne pas poursuivre les navires américains. Après s’être ravitaillés dans le nord des îles Salomon, les navires japonais rejoignent leur base de Truk le 20 septembre. Durant leur retraite vers Espiritu Santo et la Nouvelle-Calédonie, l’USS South Dakota entre en collision avec le destroyer Mahan qui est sévèrement endommagé.

Conséquences

Le capitaine Kikunori Kijima, le chef d’état-major de Goto et le commandant de la flotte de bombardement après la mort de ce dernier, affirma que sa force avait coulé deux croiseurs américains et un destroyer. Le capitaine du Furutaka, qui avait survécu au naufrage de son navire, fit porter la responsabilité de la perte de son croiseur sur une mauvaise reconnaissance aérienne et sur le commandement défaillant de l’état-major de la 8ème Flotte de l’Amiral Mikawa. Le convoi de Joshima est parvenu à transporter les hommes et les équipements nécessaires à Guadalcanal. L’Aoba est renvoyé au chantier naval Kure au Japon et les réparations sont achevées le 16 janvier 1943.

Scott avança que sa flotte avait coulé trois croiseurs et quatre destroyers japonais. L’USS Boise, qui fut renvoyé au chantier naval de Philadelphie, fut surnommé la « flotte d’un navire » par la presse du fait de ses exploits durant la bataille, mais cela était en grande partie liée au fait que les noms des autres navires furent initialement gardés secrets pour des raisons de sécurité. L’USS Boise resta en réparations jusqu’au 20 février 1943.

Bien qu’elle fût une victoire tactique américaine est un succès stratégique pour les Japonais. Dans la nuit du 15 au 16 septembre, les cuirassés japonais bombardèrent et causèrent de sévères dégâts à la base d’Henderson Field. Les troupes et les équipements déchargés par les Japonais complétèrent les préparatifs japonais pour l’offensive planifiée pour le 23 septembre.

Les Japonais revendiquèrent la victoire en affirmant qu’ils avaient coulé trois porte-avions américains, un cuirassé, un croiseur, un destroyer et un « grand navire non identifié » en plus de la destruction de 79 appareils et d’un plus grand nombre détruit lors du naufrage des porte-avions. En réalité, les Américains ne perdirent qu’un seul porte-avions, l’USS Hornet, et les destroyers USS Porter et Northampton. L’USS Enterprise fut sévèrement endommagé tout comme le cuirassé USS South Dakota, les destroyers USS Smith et Mahan. Sur les 175 avions américains présents au début de la bataille, 81 furent perdus. Par comparaison, trois navires japonais, les porte-avions Shokaku et Zuihō et le croiseur lourd Chikuma furent sévèrement endommagés et nécessitèrent d’importantes réparations. Sur 203 appareils japonais au début de l’affrontement, 99 furent perdus. Toutefois, la perte de l’USS Wasp coulé par le sous-marin I-19 monte les pertes américaines à deux porte-avions.

La destruction de l’USS Hornet et de l’USS Wasp fut une perte dramatique pour les forces alliées dans le Pacifique Sud, car il ne restait plus qu’un seul porte-avions allié opérationnel, mais endommagé pour l’ensemble du théâtre Pacifique. L’USS Enterprise fit cependant l’objet de réparations temporaires en Nouvelle-Calédonie.

En termes de navires coulés, la bataille fut une victoire des Japonais, mais ces derniers payèrent un lourd tribut. Les deux porte-avions endommagés furent forcés de retourner au Japon pour y subir d’importantes réparations. Après celles-ci, le Zuihō revint à Truk à la fin du mois de janvier 1943. Le Shokaku resta au Japon jusqu’en février 1943.

La perte de nombreux pilotes fut cependant l’élément le plus dommageable pour la marine japonaise. Les Américains perdirent 81 appareils, mais seulement 26 pilotes et membres d’équipages durant la bataille. De leur côté, les Japonais perdirent 99 appareils et 135 personnels navigants, dont 59 pilotes, nombre d’entre eux étant des chefs d’escadrille. Les Japonais perdirent plus de pilotes durant la bataille de San Cristobal que lors des précédents affrontements aéronavals dans la mer de Corail (90), à Midway (110) et dans les Salomon orientales (61). Après la bataille de San Cristobal, au moins 399 des 765 pilotes aguerris de l’aéronavale japonaise qui avaient participé à l’attaque sur Pearl Harbor étaient morts. Les Japonais perdirent tellement d’hommes que les porte-avions Zuikaku et Hiyō furent également obligés de retourner au Japon, car il n’y avait plus suffisamment de pilotes expérimentés pour armer leurs escadrilles. Après la bataille, de nombreux membres de l’état-major de la marine demandèrent le limogeage de Nagumo à cause des nombreuses pertes subit. Toutefois, Yamamoto s’y opposa fermement rappelant que les Américains avaient perdu deux porte-avions en 24 heures et que l’opération de ravitaillement était un succès total.

L’amiral Nagumo écrivit dans son rapport à destination du quartier général de la Flotte combinée : « Cette bataille est une victoire tactique, mais une défaite stratégique dévastatrice pour le Japon. Considérant la grande supériorité industrielle de notre ennemi, nous devons remporter de manière écrasante chaque bataille pour gagner cette guerre. Cette dernière, bien qu’elle soit une victoire, ne fut pas une victoire écrasante ».

L’opération HA a conforté Yamamoto dans ses nouveaux choix tactiques : « Frapper peu, frapper fort. Refuser l’affrontement quand on est en infériorité ».

Les pilotes japonais expliquèrent leur perte par le grand nombre de pièces antiaériennes qui équipaient les navires américains, dressant un véritable mur d’acier devant les avions japonais. L’état-major de la marine décida d’imiter les Américains en équipant les navires d’escortes et de ligne avec des canons antiaériens supplémentaires.

L’état-major de la marine décida également de lancer la construction d’un nouveau type de navire de transport. Les transports conventionnels sont trop lents et donc vulnérables, les destroyers du Tōkyō Express bien que rapide ne permettent pas transporter suffisamment de troupes et de matériel.

Navire de Transport rapide Type 1[2]
Après l’opération HA, l’état-major de la marine avait besoin de navire de transport plus rapide et capable de se défendre.
Après étude de la question, le nouveau type de navire devait être capable de transporter troupes, matériel, navire d’assaut amphibie et chars amphibie. Le département technique de la marine japonaise proposa le Navire de Transport rapide T.1 qui devait être construit en utilisant les techniques de production de masse et des pièces préfabriquées. L’utilisation de ces techniques de fabrication a permis d’assembler quinze navires commandés en seulement 80 jours.
Le design du T.1 était basé sur la coque des destroyers de classe Matsu, mais avec un groupe propulseur de moins pour faire de la place pour les soutes. En résultait un vaisseau de 1 500 tonnes capable de naviguer à 22 nœuds. Visuellement, le design se distinguait par une proue en pente qui descend jusqu’à la ligne de flottaison.
Les T.1 étaient équipés de rails et rouleaux qui leur permettaient de lancer des barges de débarquement même en naviguant à pleine vitesse. Les T.1 étaient armés de canons antiaériens, de charges anti-sous-marines, de radars et de sonars.
Une commande de six T.1 supplémentaires est passée au printemps 1944, portant la flotte à 21 navires. À partir de 1946, dans le cadre de la modernisation de la flotte, de nombreux navires de types plus anciens sont ferraillé et une commande vingt-cinq T.1 supplémentaire est passée, portant la flotte à 46 navires.
Les navires de cette classe ont été modernisés et maintenus en service pendant des décennies, mais relégués à un rôle de plus en plus secondaire. Le dernier navire est retiré du service en 1968 et ferraillé l’année suivante.

[1] La fente, en français. Le détroit de Nouvelle-Géorgie est le détroit qui passe au milieu des Salomon. Il est bordé par les îles Choiseul et Santa Isabel au nord, Vella Lavella, Kolombangara, la Nouvelle-Géorgie et l’île Russell au Sud. Bougainville et Guadalcanal sont les limites est et ouest du détroit.

[2] Pour plus d’informations sur la version réelle du transport rapide T.1, voir « DAI 1 GO-GATA YUSOKAN » de Bob Hackett et Sander Kingsepp sur le site combinedfleet.

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