Extraits de « Un océan de feu : La guerre du pacifique 1941-1944 » — Joe Chevalier — BBG Publishing.
La bataille de Tarawa est le débarquement américain, dans le cadre de l’opération Galvanic, et la bataille qui s’en suivirent face aux troupes japonaises du 20 au 25 septembre 1943 sur Betio et les autres petites îles de l’atoll de Tarawa ainsi que sur l’atoll de Makin, deux atolls de l’archipel des îles Gilbert dans le Pacifique.
Contexte
En 1943, alors que les forces de l’Empire du Japon se dérobent sans s’affaiblir les forces des États-Unis montent en puissance. Jusque là, le Président Roosevelt considère l’Allemagne comme étant prioritaire sur le Japon dans le calendrier des opérations alliées, toutefois suivant les recommandations de l’US Navy il est décidé de passer à l’attaque dans le Pacifique central pour conquérir l’île de Saipan avant le printemps 1944. Très vite, l’axe principal d’attaque se dessine : les îles Gilberts puis les Marshalls et les Mariannes. Les îles Caroline et les Philippines attendront.
Il est indispensable cependant de rappeler l’histoire des Gilberts avant l’opération. En décembre 1941, les Japonais prennent possession de l’atoll de Makin, les Britanniques décident alors d’évacuer Tarawa ne laissant sur place que des missionnaires et des garde-côtes. En septembre 1942, les Japonais finissent par prendre possession de Tarawa. Des garnisons sont établies sur les îles environnantes.
En 1942, les forces américaines achèvent la reconquête des Salomon et de la Papouasie–Nouvelle-Guinée abandonnée par les Japonais pendant l’hiver 1942-43 et l’été 1942. Le général Douglas MacArthur reçoit l’ordre de renforcer ses positions dans les Salomon et en Papouasie–Nouvelle-Guinée et de préparer ses troupes en vue de la progression dans les Carolines et aux Philippines qui seront lancées après la prise de Saipan.
Dès juillet 1942, des opérations de reconnaissance aérienne au-dessus des Gilberts mettent en évidence la création d’une piste d’aviation sur l’île de Betio. Cette information convainc définitivement les amiraux Chester Nimitz et Ernest J. King de l’importance de la reprise des Gilberts. Ce plan aura pour nom Galvanic.
Pendant ce temps, les Japonais se sont préparés à l’attaque américaine. Les îles Marshall ont en grande partie été évacuées, il ne reste plus que le minimum vital pour assurer les opérations courantes. Le dispositif dans les Gilberts a été renforcé et réorganisé autour des atolls de Makin et Tarawa. Cette dernière position a été transformée en véritable forteresse.
Plan et forces américaines
Pour l’opération Galvanic, Nimitz et son état-major prévoient des débarquements sur les îles de Nauru, Betio, Tarawa et Abemama. Nauru et Abemama étant très peu défendu leur invasion est retardée au profit d’une attaque massive sur Tarawa, Makin et Betio. Pendant plusieurs semaines, les positions japonaises sont matraquées par les porte-avions américains pour affaiblir les défenses. La flotte américaine comporte de nombreux porte-avions, car un raid japonais est à craindre. En effet, la grande majorité de navires de la flotte japonaise a mené un grand exercice dans les îles Caroline du 15 au 18 août 1943.
Les ordres de Nimitz à à Raymond Spruance sont simples « Capturer, occuper, défendre et développer Makin, Tarawa, Abemama puis prendre Nauru » afin de :
- Contrôler totalement les îles Gilberts
- Préparer la conquête des îles Marshall
- Sécuriser les lignes alliées
- Augmenter la pression sur les Japonais
- Couper une part de l’approvisionnement japonais en phosphate
Le 25 août 1943, tout est fin prêt pour le débarquement sur Tarawa qui sera mené par le Regimental Combat Team 2 composé du 2ème Régiment de Marines, du 2ème Bataillon du 8ème Régiment de Marines. Le reste des Bataillons du 8ème Régiment formant la réserve divisionnaire. Le 6ème Régiment de Marines est maintenu en réserve. Les trois bataillons d’assauts devront se porter sur les plages de Red 1, Red 2 et Red 3. Ces plages sont situées au nord-est de l’île. Pour débarquer, les Américains devront utiliser des LVT (Landing Vehicle Tank) à faible tirant d’eau pour franchir la barrière de corail séparant l’océan du lagon. En outre, le débarquement ne peut se faire qu’à marée haute et faute de connaissances sur les fonds marins autour de Tarawa, les Américains ne sont pas sûrs de leur coup. Pour le bombardement de l’île, les Américains ont prévu un long pilonnage de l’île avec l’artillerie de marine avant l’intervention de l’aviation. Le débarquement doit commencer à 8 h 30. Red 3 se trouve à 500 mètres à l’est de la jetée et c’est là que débarquera le 2ème Bataillon du 8ème Régiment de Marines. À l’ouest de la jetée, le 2ème Bataillon du 2ème Régiment de Marines devra débarquer sur Red 2 et enfin Red 1 qui se trouve à l’extrême est et mesure 500 m comme Red 2 sera le lieu de débarquement du 3ème Bataillon du 2ème Régiment de Marines.

Ordre de bataille américain :
5ème Flotte commandée par le Vice-Amiral Raymond Spruance.
La Task Force 52 forme le groupe d’attaque Nord commandé par le Contre-Amiral Richmond Turner :
- Task Force 52.1: Transports Leonard Wood, Neville, Pierce, Calvert, Alcyone et Belle Grove transportant le 165 RCT et 105ème Bataillon de la 27ème Division (Major-Général Holland Smith) ainsi que 193ème Bataillon blindé. Les transports sont protégés par les destroyers Mustin, Kimberly, Burns et Dale.
- Task Force 52,2, groupe d’appui-feu : Cuirassés New Mexico, Pennsylvania, Idaho et Mississippi. Croiseurs Minneapolis, San Francisco, New Orleans et Baltimore. Destroyers Dewey, Hull, Maury, Gridley, Phelps et Macdonough.
- Task Force 52,3, groupe de support aérien : Porte-avions d’escorte Liscombe Bay (16 Wildcats et 12 Avengers), Coral Sea (16 Wildcats et 12 Avengers) et Corregidor (16 Wildcats et 12 Avengers). Destroyers Morris, Hoel, Franks, Hughes, Revenge.
- Task Force 52,4, groupe de débarquement de Makin : Destroyer Dale et 3 LST.
La Task Force 53 forme le groupe d’attaque Sud commandé par le Contre-Amiral Harry Hill.
- Task Force 53.1: Transports Zeilin, Harry Lee, Willim P.Biddle, Arthur Middleton, Heywood, Harris, J.Franklin Bell, Ormsby, Feland, Monrovia, Doyen, Sheridan, Thuban, Bellatric, Virgo, Ashland et La Sall transportant la 2ème Division de Marines renforcés et protégés par les destroyers John Rodgers, Sigsbee, Heermann, Hazelwood, Harrison, McKenn, Murray et les dragueurs de mines Requisite et Pursuit (TF 53.2).
- Task Force 53,4, groupe d’appui-feu : Cuirassés Tennessee, Maryland et Colorado. Croiseurs légers Mobile et Santa Fe. Croiseurs Portland et Indianapolis. Destroyers Bailey, Frazier, Gansevoort, Meade, Anderson, Russell, Ringgold, Dashiell et Shroeder.
- Task Force 53,6, groupe de support aérien : Porte-avions d’escorte Sangamon (9 Avengers, 9 Dauntless, 12 Hellcats), Suwannee (9 Avengers, 9 Dauntless, 12 Hellcats), Chenango (9 Avengers, 9 Dauntless, 12 Hellcats), Barnes (22 Hellcats) et Nassau (22 Hellcats). Destroyers Aylwin, Monaghan, Cotton et Cowell.
- Task Force 53,4, groupe de débarquement de Tarawa : Destroyer Bancroft et 3 LST.
Task Force 50, force de porte-avions commandé par le Contre-Amiral Charles Pownall.
- Task Force 50.1, flotte d’interception : Porte-avions Yorktown (37 Hellcats, 36 Dauntless, 18 Avengers) et Lexington (37 Hellcast, 36 Dauntless, 18 Avengers). Porte-avions léger Cowpens (36 Hellcats, 10 Avengers). Cuirassés South Dakota et Washington. Destroyers Nicholas, Taylor, La Vallette, Izard, Charrette et Conner.
- Task Force 50.2, groupe de porte-avions Nord : Porte-avions Enterprise (36 Hellcats, 36 Dauntless, 19 Avengers). Porte-avions légers Belleau Wood (36 Hellcats, 9 Avengers) et Monterey (24 Hellcats, 9 Avengers). Cuirassés Massachusetts, North Carolina et Indiana. Destroyers Boyd, Bradford, Brown, Fletcher, Radford et Jenkins.
- Task Force 50.3, groupe de porte-avions Sud : Porte-avions Essex (37 Hellcats, 36 Dauntless, 19 Avengers) et Bunker Hill (36 Hellcats, 32 Helldivers). Porte-avions léger Independence (28 Hellcats, 9 Avengers). Croiseurs Chester, Pensacola et Salt Lake City. Croiseur léger Oakland. Destroyers Erben, Hale, Bullard, Kidd et Chauncey.
- Task Force 50.4, groupe de secours : Porte-avions Saratoga (37 Hellcats, 25 Dauntless, 19 Avengers). Porte-avions léger Princeton (24 Hellcats, 9 Avengers). Croiseur léger San Diego. Destroyers Stack, Sterette, Wilson et Edwards.
Ainsi qu’une flotte de soutien avec escorte, des patrouilles de sous-marins et des avions basés à terre. La flotte américaine totalise plus de 200 navires.
Fortification et effectifs japonais
Le 10 décembre 1941, les Japonais prennent le contrôle de l’archipel de Tarawa et principalement Betio. Le 15 septembre 1942, les troupes du 6ème SNLF de Yokosuka débarquent sur l’île, suivie du 11ème Régiment de pionniers deux mois plus tard. En février 1943, le Major-Général Yoshima Nishida arrive sur l’île à la tête de la 1ère Brigade amphibie de l’Armée arrivée directement de Mandchourie. Enfin, en mai arrive la 4ème unité de construction. En août, le Contre-Amiral Keiji Shibasaki prend le commandement des forces présentes sur l’île.
Ordre de bataille japonais :
Garnison de Tarawa, commandée par le Contre-Amiral Keiji Shibasaki.
- 3ème SNLF : 1 120 hommes.
- 111ème Régiment de pionniers : 1 247 hommes.
- 4ème Unité de construction : 970 hommes.
- 1ère Brigade amphibie (commandée le Major-Général Yoshima Nishida) : 2714 hommes et 9 chars Type 95 HA-GO.
Soit plus de 6000 hommes, mais le génie est composé essentiellement de Coréens n’est pas destiné au combat.
Les fortifications sont disposées de manière à se couvrir mutuellement, à se replier et défendre dans la profondeur assurant une grande cohésion dans la défense japonaise. Les fortifications nippones sont garnies de mitrailleuses et canons :
- 4 canons Vickers de 203 mm.
- 4 canons de 140 mm.
- 6 canons de 80 mm.
- 4 canons antiaériens de 127 mm.
- 8 canons antiaériens de 75 mm.
- 27 mitrailleuses antiaériennes de 13 mm.
- 4 mitrailleuses antiaériennes de 13 mm en affût double.
- 10 canons de 75 mm.
- 6 canons de 70 mm.
- 9 canons de 37 mm.
- 31 mitrailleuses de 13 mm.
- Plusieurs dizaines de mitrailleuses de 7,7 mm.
Tout cet armement était installé le plus souvent dans des encuvements en bois. Sauf quelques exceptions, comme les canons de 203 mm (dont deux sont montés en escalier) et les canons de 140 mm, installés dans des petits encuvements en béton, ils sont souvent accompagnés d’un mirador pour l’observation. Certains canons de calibre moyen (comme les obusiers de 70 mm) étaient mis dans des casemates en bois. Les mitrailleuses sont les armes les mieux protégées, souvent installées dans des bunkers allant du pillbox en bois jusqu’à la grosse casemate en béton armé : ce sont elles qui feront le plus de dégâts lors de la bataille.
Les avions et hydravions basés sur l’île ont été évacués 5 jours avant l’assaut américain, mais les pionniers japonais ont construit de faux avions en bois et feuillage et peints aux couleurs de la marine et installés tout le long de l’aérodrome afin de divertir une partie des efforts américains. Le carburant d’aviation a été utilisé pour fabriquer des bombes enterrées sur les voies de passage les plus probables des Américains lorsque ceux-ci auront débarqué.
Les fortifications japonaises Extraits de Guerre et Histoire N° 67 |
Les fortifications de l’île sont les suivantes : les premiers obstacles sont des tétraèdres en béton ou des rondins de bois — généralement surmontés d’une mine — pour gêner les barges de débarquement. Sur le bord de plage est placée une deuxième ligne de rondins de bois, interdisant l’accès aux véhicules, parfois agrémenté de barbelés. Les premières fortifications sont regroupées sous forme de fortins indépendant, reliées par des tranchées et équipées de simples mitrailleuses installées dans des pillbox en bois, ou en béton. La présence de canons n’est pas rare. Les mortiers sont placés dans des encuvements spéciaux, dans les terres. Ce système de fortins indépendants permet aux positions de se couvrir mutuellement et si une position tombe, toute la défense ne s’écroule pas. |
Déroulement de bataille de Tarawa
Le débarquement, 20 septembre :
Durant la progression de la flotte, plusieurs escadrilles américaines bombardent Betio et Tarawa du 13 au 19 septembre 1943. Le 19 septembre, les premiers navires apparaissent au large de Tarawa et commencent à pilonner les défenses japonaises. Le Contre-Amiral Shibasaki ouvre alors une lettre de l’Amiral Yamamoto qu’il avait pour consigne d’ouvrir lorsque les combats commenceraient. Yamamoto lui ordonne de « se rendre dès lors que les vivres et munitions seront épuisés et de n’y voir aucun déshonneur ».
Dans la nuit du 19 au 20 septembre, les Américains commencent leurs préparatifs en vue du débarquement, mais ils sont repérés à 4 h 41. Les canons japonais tirent sans atteindre leurs cibles. Les troupes américaines commencent à embarquer sur les péniches de débarquement non sans difficulté et les premières vagues de LVT ont du mal à garder leur cohésion. À 5 h 42, les navires américains stoppent leurs tirs pour laisser place à l’aviation. Les appareils de l’US Navy étant en retard, la flotte reprend son bombardement à 6 h 5. À cause des tirs antiaériens japonais et de la mauvaise visibilité l’aviation ne parvient pas remplir sa mission. Dès 6 h 20, l’ensemble de la flotte reprend les tirs.

À 7 h 15, les premières péniches de débarquement entrent dans le lagon, accompagnées de quelques dragueurs et destroyers. Toutefois, à cause de la confusion l’heure H est repoussée à 8 h 45. Pendant ce temps, un groupe d’homme du Scout Sniper Platoon parvient à prendre pied sur la jetée. Toutefois l’un des bidons explosifs enterrés par les Japonais endommage gravement la jetée ce qui gênera son utilisation par les Américains plus tard dans la bataille.
À 9 h 10, les péniches du 3ème Bataillon du 2ème Régiment de Marines franchissent la barrière de corail et approchent de la plage Red 1. Les Japonais déclenchent un feu nourri qui détruit plusieurs LVT. La compagnie I parvient à mettre en place une tête de pont, mais une position japonaise entre Red 1 et Red 2 prend les Marines en enfilade. Les compagnies K et L sont bloquées, cette dernière perd 35 % de ses effectifs. Le 2ème bataillon du 8ème Régiment débarque sur Red 3 à 9 h 17 avec très peu de pertes et commence à s’enfoncer dans l’île. Sur Red 2, les forces américaines subissent de lourdes pertes sans établir de tête de pont solide.
Les vagues suivantes ne peuvent débarquer sur la plage et doivent franchir le lagon à pied avec de l’eau jusqu’à la taille, voire jusqu’aux épaules. Sous le feu nourri des Japonais, les Américains sont complètement désorganisés. Le commandant du 2ème Bataillon du 2ème Régiment, le Colonel Amey, est tué. Il est remplacé par le Colonel Jordan. Ce dernier — simple observateur pour la 4ème Division de Marines — prend le commandement d’une force totalement désorganisée par le manque de radio et n’ayant pas pu établir de tête de pont.
Comme Amey, Marshall tente de débarquer sur Red 2. Il y parvient à 10 h 30 en parcourant les 200 derniers mètres dans l’eau. Du fait des pertes, le problème des renforts commence à se poser. La situation est très précaire et les péniches subissent un feu nourri. Le Colonel Marshall est contraint d’engager le 1er Bataillon du 2ème Régiment, tenu en réserve, sur Red 2. Le bataillon du Major Kyle débarque et subit de lourdes pertes.
Le Général Smith considérant la tête de pont sur Red 3 suffisamment étendu, envoie le 3ème Bataillon du 8ème Régiment. Le débarquement se fait difficilement, les Marines subissent de lourdes pertes. Les 2ème et 3ème vagues, après l’hécatombe subie par la 1ère, se dirigent vers la jetée. En fin de matinée, des chars débarquent pour soutenir l’infanterie. Sur Red 1, deux chars sont débarqués, mais l’un est touché par un obus qui bloque sa tourelle, puis son canon est mis hors de combat. Ce premier char se replie, le second est incendié par un obus explosif (HE) de 75 mm. Sur Red 2, trois chars sont débarqués et combattent toute la journée, deux finiront par être mis hors de combat. Sur Red 3, quatre Sherman débarquent, mais trois sont détruit dont un par l’aviation américaine.
À cause des liaisons radio déficientes, le Général Smith sur l’USS Maryland a beaucoup du mal à connaître la situation malgré les avions d’observation. Le colonel Carlson, à la demande de Marshall, doit rejoindre l’USS Maryland pour informer Smith de la réalité sur le terrain.
À 15 h 30, la situation est la suivante :
- Red 1, tête de pont sur 150 mètres de profondeur.
- Red 2, les Marines s’abritent derrière le mur antichar en troncs de cocotiers (construit par les Japonais) le long de la jetée.
- Red 3, les Marines sont encore bloqués sur le rivage.
La majorité des combats se déroulent sur Red 1. Les deux Shermans contournent la tête de pont pour ne pas rouler sur les cadavres de leurs frères d’armes et appuient l’infanterie. En fin de journée, la tête de pont atteint 500 mètres de profondeur sur 15 mètres de large.
Se trouve sur Red 1 :
- 3ème Bataillon du 2ème Régiment : débris des compagnies K, I, L et un peloton de la compagnie M.
- 2ème Bataillon du 2ème Régiment : 1er peloton de la compagnie E, 1er peloton de la compagnie G, 2ème et 3ème pelotons de la compagnie H ainsi que l’état-major du bataillon.
- 3 officiers et 110 hommes du 1er Bataillon du 2ème Régiment débarqués ici par erreur.
Malgré leur progression, les Américains ne sont pas parvenus à réduire les positions japonaises au silence. Ces derniers — faute de moyens adaptés — laissent parfois les Américains dépasser leurs positions pour ensuite leur tirer dans le dos. À la nuit tombée, seulement 600 mètres de terrain séparent Red 1 de Red 2. L’ensemble des têtes de pont américaines couvre une surface de 1500 m2. Une contre-attaque nocturne des Japonais aurait sûrement suffi à rejeter les Américains à la mer, mais faute de moyen de communication en bon état, Shibasaki ne parvient pas à entrer en contact avec ses troupes.
21 septembre :
Au début de la journée, à la demande de Marshall, Smith fait débarquer le 1er Bataillon du 8ème Régiment sur Red 2. À 6 h 15, la première vague débarque dans le lagon et doit franchir les 500 derniers mètres dans l’eau. Les quatre premières vagues se dirigent vers la limite entre Red 1 et Red 2. La zone est battue par les tirs japonais qui s’étaient servis de cette position pour prendre de flanc les Américains la veille. Ainsi les Américains, désorganisés, arrivent sur la plage sans matériel lourd pour réduire les positions japonaises. Seul 90 des 199 hommes de la première vague sont encore en état de combattre. Le major Hays, chef du bataillon, parvient à regrouper ses hommes à l’extrémité ouest de Red 2 pour se préparer à rejoindre Red 1. Les 1er et 2ème Bataillons du 2ème Régiment, eux aussi sur Red 2, doivent se porter au Sud pour atteindre l’autre rive de Betio. Un peloton de mitrailleuse assure un feu nourri sur les positions japonaises pendant que 300 hommes commandés par le major Kyle partent à l’assaut. Après avoir mis deux heures pour réduire l’unique position japonaise défendant l’aérodrome, les Américains atteignent enfin la côte sud et s’y établissent. Trop peu nombreux, ils ne laissent pas de détachement de sécurité sur l’aérodrome et sont entourés par de fortes positions ennemies. À 21 h, Kyle n’a plus que 180 hommes en état de combattre, pas d’eau et de nourriture et peu de munitions. Malgré une contre-attaque japonaise, les Américains tiennent bon et sont finalement ravitaillés par des LVT.
Sur Red 1, les hommes du Major Ryan reçoivent l’ordre de conquérir Green Beach sur la côte ouest. Avec l’aide du sous-lieutenant Greene, observateur d’artillerie de la marine, Ryan obtient le soutien de deux destroyers. Après une bonne préparation d’artillerie, les Marines se lancent à l’attaque et parviennent à supprimer toutes les défenses japonaises en deux heures. Le tir précis des destroyers a fait de nombreux morts dans les rangs ennemis.
Malgré la faible profondeur de la tête de pont, le Général Smith envoie le 1er Bataillon du 6ème Régiment sur Betio. Les Américains interceptent une communication japonaise disant que les Japonais ont décidé de se replier sur l’îlot de Bairiki à marée basse. Smith décide d’y envoyer le 2ème Bataillon pour leur couper toute voie de repli. Pendant ce temps, le 1er bataillon débarque sur Green à 19 h, soit un retard de deux heures sur l’horaire initial. Plusieurs chars M3 Stuart sont débarqués à 20 heures. À la demande de Marshall et devant le retard accumulé, l’attaque du 1er Bataillon est reportée au lendemain.
Sur Red 3, le 2ème Bataillon du 8ème Régiment progresse très difficilement. Les Américains ne sont qu’à quelques dizaines de mètres du Poste de Commandement de l’Amiral Shibasaki où sont retranchés les hommes de la SNLF et la 1ère Brigade amphibie gardée en réserve. Les chars de la 1ère Brigade amphibie ont été « enterrés » dans des casemates en troncs d’arbres.
À la fin de la journée, les Américains sont en position de gagner. Les alentours de Green Beach sont dégagés, une poche étroite, mais solide est établie au sud de l’aérodrome, au Nord la tête de pont s’étend sur 500 mètres. Marshall envoie comme message à Smith « Nous sommes en train de gagner ». Smith décide d’envoyer Edson — chef de la 2ème Division — diriger les opérations logistiques.
22 septembre, les Américains progressent :
Dans la nuit du 21 septembre, Edson et Marshall préparent les opérations pour le 22 septembre. Conscients que les échecs précédents sont dus au manque d’intervention de l’artillerie, ils décident de faire intervenir les batteries des cuirassés. De 7 h à 10 h 30, les canons de la marine et les quelques batteries débarquées sur l’île pilonnent les positions japonaises. Edson et Marshall prévoient trois attaques :
- Le 1er Bataillon du 6ème Régiment doit faire la jonction avec les unités présentes au sud de l’aérodrome en attaquant plein est.
- Le 1er Bataillon du 8ème Régiment doit attaquer vers l’ouest depuis Red 2 pour anéantir la poche japonaise située entre Red 1 et Red 2.
- Le 8ème Régiment, à l’est, doit agrandir la tête de pont.
L’attaque contre la poche japonaise débute à 7 h avec le soutien de chars légers. L’attaque est lente, les Marines éliminent méthodiquement les points de résistance japonais. Malgré le soutien des chars M3, les Américains ont du mal à en finir, car les obus de 37 mm des chars sont insuffisants. L’infanterie utilise alors des bangalores et des charges de TNT. Suite à la perte d’un des M3, les deux restants sont remplacés par une section de half-tracks équipés de canons de 75 mm. À la fin de la journée, la poche japonaise n’est toujours pas détruite.

L’attaque sur Green Beach commence bien — mais en retard — grâce à une forte cohésion entre les chars et les fantassins. Les Shermans détruisent les bunkers et nids de mitrailleuses, les fantassins abattent les Japonais qui se lancent sur les chars avec des mines magnétiques. À 11 h, les hommes du 1er Bataillon font la jonction avec les hommes encerclés au sud de l’aérodrome. Les Japonais ont perdu environ 250 hommes, les Américains eux ont très peu de tués. Excepté la poche entre Red 1 et Red 2, l’ensemble de la partie occidentale de l’île est aux mains des Américains. Le Major Jones, commandant du 1er Bataillon, prévoit une offensive majeure pour le lendemain avec l’aide des chars, de l’aviation et l’artillerie navale. Le 8ème Régiment devra attaquer à l’est, malgré l’opposition de leur chef dont les hommes sont épuisés.
L’assaut du 2ème Bataillon du 8ème Régiment doit détruire trois points de résistances japonais près de la jetée : un nid de mitrailleuse sous coupole blindée, un abri en béton et un abri en troncs de cocotiers. À 9 h 30, des tirs de mortier permettent de détruire l’abri en troncs de cocotier. Au même moment, couvert par les Sherman les Marines attaquent la coupole blindée. Face à l’abri bétonné, l’avance se fait à l’aide des lance-flammes du génie, la position tombe après une heure de combat. C’est un véritable massacre, les Marines couvrent les accès avec des mitrailleuses et des grenades, les entrées d’air sont bouchées par des bulldozers, les Japonais sont massacrés quoiqu’ils tentent.
Pendant la journée, le 3ème Bataillon du 6ème Régiment débarque enfin après avoir passé la nuit dans ses péniches. À midi, le Général Smith débarque sur Green Beach et gagne Red 2 en Amtrac (en se faisant tirer dessus) pour y établir son PC. Le plan d’attaque de l’après-midi est : le 1er Bataillon du 6ème Régiment doit attaquer à l’est et capturer un fossé antichar à l’est de la piste d’aviation.
L’avance commence à 12 h 30. Malgré la fatigue accumulée par l’offensive du matin, la compagnie A soutenue par 8 chars (1 Sherman et 7 Stuarts) se met en route. La compagnie B suit la A ; la C est tenue en réserve. À 13 h 30, à peine commencée, l’attaque est stoppée net par une tourelle blindée. Il faut 1 h 30 de combat avec l’aide d’un Sherman pour anéantir la position. À 15 h, la compagnie A assoiffée reçoit enfin de l’eau et la compagnie B passe en tête de l’offensive à 16 h. La compagnie C quant à elle est envoyée relever le 2ème bataillon du 8ème régiment au sud de la poche japonaise près de la jetée. À 18 h 30, le reste des Marines se retranchent pour la nuit, car ils n’ont pas réussi à progresser. La poche japonaise près de la jetée est enfin anéantie. En dehors de la poche entre Red 1 et 2 toute la partie occidentale de l’île est sous contrôle américain, pourtant l’optimisme ne règne pas encore dans l’état-major américain. Le Général Smith ordonne le débarquement des 2ème et 3ème bataillons et du 6ème Régiment sur Green Beach. Le 3ème Bataillon devra faire route vers l’est de l’île avec tous les chars.
23 septembre, la contre-attaque japonaise :
Dans la journée du 22 septembre, les munitions s’épuisant et l’ennemi se rapprochant, Keiji Shibasaki révèle le contenu de la lettre de Yamamoto à son état-major et au général Nishida. Ce dernier refuse de se rendre. Appartenant à l’Armée il estime ne pas avoir à obéir à un ordre émanant de la Marine et qu’il juge déshonorant. Yoshima Nishida décide de mener une contre-attaque avec l’ensemble de la 1re Brigade amphibie soit 2500 hommes et 5 chars Type 95 HA-GO (4 ont été détruits par les bombardements américains).
Le PC de Shibasaki Extraits de Guerre et Histoire N° 67 |
Le bunker de commandement de Shibasaki est situé là où un débarquement serait le moins probable. Celui-ci est composé de deux niveaux, plus le toit qui peut servir pour les soldats japonais lors d’un éventuel combat. Il n’y a que trois entrées : une en passant sur le toit par l’escalier extérieur. Les deux autres donnent sur la façade nord, elles sont protégées des tirs directs de canons par des murs épais installés juste en face. Au rez-de-chaussée se trouve l’endroit où les briefings sont effectués et qui sert aussi de petit dépôt. Au 1er étage se trouve la salle de commandement avec les radios et les cartes d’état-major. L’ouvrage est protégé par une dizaine de mitrailleuses donnant sur tous les côtés et réparti sur les deux étages et le toit. |
À 19 h 30, une première offensive japonaise, lancée par 150 hommes, parvient à ouvrir une brèche dans les lignes américaines. Les Marines parviennent à combler la brèche. Convaincus qu’une offensive d’envergure se prépare, les Américains mettent en place un tir d’artillerie 75 mètres devant leur position. Les tirs d’artillerie ne parviennent pas à gêner la préparation des Japonais, mais ces derniers ne parviennent pas à repérer les positions de mitrailleuse américaine. En conséquence, Nishida retarde son offensive.
Le 23 septembre à 3 h du matin, les hommes de Nishida déclenchent un tir massif avec des mitrailleuses, des mortiers et des pièces d’artillerie sur les positions des Marines. Les bidons de carburants enterrés un peu partout autour de la position japonaise explosent et surprennent les Américains faisant même quelques victimes. À 4 h, 2 300 soldats japonais de la 1ère Brigade amphibie partent à l’attaque avec l’appui de 5 chars. Le Major Jones comprend rapidement que c’est une contre-attaque de grande ampleur et demande l’appui des destroyers USS Schreder et Sigsbee. Après une heure de combat, les Japonais ont déjà perdu 350 hommes et un char. Les Marines défendent dans la profondeur, reculant à chaque fois qu’ils sont sur le point d’être débordés. À 7 h, les derniers chars japonais sont détruits et seuls 800 hommes sont encore en état de combattre. Incapable de déborder les Américains à la régulière, les Japonais ont multiplié les charges banzai avant le lever du soleil.
Les hommes de l’Armée japonaise se retranchent partout où ils peuvent et tendent des embuscades. Il faudra toute la journée une partie de la nuit aux Américains pour regagner le terrain perdu et nettoyer les positions japonaises.
Sur les 2 300 Japonais ayant pris part à l’attaque, seuls 15 Japonais sont pris vivants. Les Américains ont eu 200 morts et blessés.
Le soldat de 1ère classe Robert Jones raconte : « Nous venons de vivre une nuit en enfer. Comment puis-je encore être vivant ? Les Japonais sont complètement dingues. En pleine nuit, ils se sont jetés par centaines sur nos lignes. Ils se sont lancés à découvert sous les tirs de notre artillerie et de nos mitrailleuses, le pire c’est qu’ils ont réussi à passer, nous obligeant à reculer. Ils défient la mort et ne craignent pas les balles. Plusieurs de nos positions ont été jusqu’au corps à corps avec ces tarés, heureusement nos chars nous ont aidés à les tailler en pièces. Avant le lever du soleil, les Japs encore vivants se sont éparpillés aux quatre vents, planqué dans chaque bosquet, terré comme des rats dans chaque trou pour nous tirer comme des lapins. Il nous a fallu jusqu’au coucher du soleil pour nous débarrasser d’eux et reprendre le terrain que nous avions perdu. Des corps et des restes humains jonchent le sol, l’odeur est pestilentielle. Si les Japonais nous réservent le même traitement à chaque bataille, cette guerre pourrait bien durer quinze ans. »
What if? |
Aujourd’hui, tous les experts s’accordent à dire que si cette contre-attaque japonaise avait eu lieu dans la nuit du 21 au 22 ou même le jour du débarquement, les Américains auraient été rejetés à la mer de manière sanglante. |
24 septembre, la fin de la bataille :
Avec l’échec de la contre-attaque de l’Armée et l’épuisement des vivres et munitions, l’Amiral Shibasaki décide de suivre les ordres de l’Amiral Yamamoto ; il ne reste alors plus que 500 combattants valides autour de sa position.
À 8 h du matin, les hommes du 3ème Bataillon du 6ème Régiment s’apprêtent à attaquer les positions japonaises, dont le PC de Shibasaki. Les positions japonaises sont pilonnées depuis près de deux heures par l’aviation, l’artillerie et la marine. Au moment où les Marines passent à l’attaque, plusieurs positions japonaises dressent des drapeaux blancs. Une voix dans un anglais très hésitant annonce la reddition du 3ème SNLF faute de munitions. Les Américains n’en croient pas leurs yeux, les combats autour du PC japonais cessent. Toutefois par manque de radio, la poche de résistance entre Red 1 et Red 2 et les îlots voisins ne recevront jamais l’information.
À 10 h, le Général Smith se présente en personne pour recevoir la reddition des Japonais. Toutefois, ce n’est pas Shibasaki qui se présente, mais un membre de son état-major. Shibasaki s’est fait Seppuku et tous les documents du PC ont été détruits. À 13 h, le cessez-le-feu est considéré comme effectif, les Américains comptent 5 morts et 17 blessés, 457 Japonais sont faits prisonniers ainsi que 211 travailleurs (majoritairement coréens).
La poche de résistance japonaise — entre Red 1 et Red 2 — ne cesse pas le combat, car elle n’en a pas reçu l’ordre. Le 1er Bataillon du 8ème Régiment de Marines doté de half-tracks, de lance-flammes, de charges explosives et de canons de 75 attaque la position japonaise par le Nord. Un peloton de Marines contourne la position par l’est et le 3ème Bataillon du 2ème Régiment attaque par l’ouest. Les Japonais sont retranchés dans un bunker que les Américains sont obligés de détruire à coups de canons et d’explosifs. Les autres positions japonaises, plus légères, sont réduites au silence une à une. À 16 h, les combats cessent et les Marines font cinq prisonniers.
Le 25 septembre au matin, l’Amiral Hill débarque sur l’île alors que les Marines sont placés en position défensive dans l’attente d’un débarquement japonais qui n’arrivera jamais.
Keiji Shibasaki Extraits Wikipédia |
Keiji Shibasaki (9 avril 1894 – 24 septembre 1943) est né à Kasai, dans la préfecture de Hyogo. Il est diplômé de la 43ème promotion de l’Académie navale impériale japonaise en 1915, se classant 26ème sur 95 cadets. Il a servi comme aspirant sur le croiseur Azuma et le cuirassé Settsu. En tant qu’enseigne de vaisseau, il a été affecté au Satsuma et au croiseur Yakumo. En tant que lieutenant de rang inférieur, il a servi sur le croiseur Chikuma, le destroyer Kaba et le cuirassé Yamashiro. Shibazaki a été promu lieutenant en 1921, et après avoir suivi des cours de navigation, il a été affecté comme chef de la navigation sur le Tachikaze, le pétrolier Kamoi et le navire de recherche Musashi. Après sa promotion au grade de lieutenant-commandant en 1927, il est nommé aide de camp du prince Kuni Asaakira de 1932 à 1933. En 1936, il reçoit son premier commandement, la canonnière Ataka. Promu capitaine en 1937, il occupe divers postes d’état-major, principalement à Kure et à Shanghai. Shibazaki est promu au rang de contre-amiral le 1er mai 1943 et sur l’île de Betio en août 1943 afin de prendre le commandement de la garnison japonaise. Il y commande des troupes de marine, mais aussi des troupes de l’armée qui ont été placées sous son autorité. Shibasaki était un vétéran des opérations amphibies en Chine pendant la guerre Sino-Japonaise et savait comment défendre l’île contre un débarquement ennemi. Il a établi de fortes défenses étendues sur l’ensemble de l’île. Il s’est donné la mort le 24 septembre après avoir ordonné la reddition de ses troupes à court de munitions. |
Déroulement de la bataille de Makin
Parallèlement à la bataille de Tarawa, la 27ème Division d’infanterie américaine doit conquérir Butaritari, principal îlot de l’atoll de Makin. Le débarquement est confié au 165ème RCT composé du 165ème Régiment d’infanterie et du 3ème Bataillon du 105ème Régiment d’infanterie.
La défense japonaise est commandée par le lieutenant Seizo Ishikawa et compte :
- 284 soldats de la 3ème SNLF.
- 138 pionniers du 11ème régiment.
- 100 personnels au sol de l’aéronaval qui n’ont pas pu être évacués.
- 76 Japonais et 200 Coréens de la 4ème unité de construction.
20 septembre, le débarquement :
Le débarquement sur Butaritari est précédé par un bombardement de la Task Force 52. Le bombardement s’avère inefficace, car aucun japonais n’est tué et leurs positions défensives restent intactes. Les Américains débarquent sans qu’aucun coup de feu ne soit tiré et les avions d’observation ne voient aucune trace des Japonais. Malgré cela, l’Amiral Turner décide de laisser les bombardements se poursuivre comme prévu. Pendant ce temps, l’infanterie s’avance vers l’intérieur de l’île. Assez vite, une mitrailleuse et quelques fusils tirent sur les Américains qui stoppent leur avance pendant plusieurs heures malgré leur supériorité numérique. De leur côté, les commandants des chars M3 refusent d’obéir aux ordres de l’infanterie. Le Colonel Conroy, chef du 165ème RCT, et le Colonel Roosevelt, observateur de l’USMC, tentent de raisonner les commandants de chars. Roosevelt est tué par un tireur isolé ce qui stoppe définitivement les Américains. Le seul autre incident de l’après-midi est l’explosion accidentelle d’une tourelle de l’USS Mississippi, qui tue 43 marins.
21 septembre, calme sur terre, bataille en mer :
Le 21 septembre voit le Général Smith, commandant des opérations terrestres de Galvanic, débarquer sur l’île de Makin. Énervé par la couardise de ses troupes la veille, il décide de se montrer devant ses hommes espérant les motiver. La majorité des soldats refusent d’avancer, car ils ne voient aucune raison de risquer leur vie pour conquérir un si petit îlot. Apprenant qu’une position japonaise au Nord bloque toute progression, Smith se rend sur place. Il y découvre un secteur extrêmement calme. La nuit du général est même perturbée par les tirs de sentinelles effrayés par des Japonais imaginaires. Si la journée et la nuit ont été très calmes sur l’île, ce n’est pas la même chose en mer.
Alors qu’à Tarawa, la bataille se déroule sans intervention de la marine ou de l’aviation la situation autour de Makin n’est pas la même. À midi, le destroyer USS Gansevoort détecte l’écho d’un sous-marin japonais à quelques kilomètres de la côte. Peu après l’USS Meade détecte lui aussi un écho. Malgré leurs recherches, les navires américains ne trouvent pas les sous-marins. À 17 h, après avoir détecté un écho tout proche, les deux navires grenadent la zone pendant trente minutes avant d’apercevoir un périscope. Le sous-marin I-35 émerge près de l’USS Frazier qu’il décide d’éperonner. Alors que le destroyer recule pour se dégager et évacuer, les Japonais mettent leur canon en batterie et s’apprête à tirer, mais les Américains sont plus rapide et le sous-marin coule corps et bien. Les Américains envoient une baleinière recueillir quatre survivants japonais, ces derniers tirent au pistolet sur leurs sauveurs qui les abattent à la mitraillette.
Les derniers jours de Makin :
Le 22 septembre, la résistance japonaise sur Makin a quasiment disparu, les Américains ont l’avantage du nombre à 23 contre 1. Malgré tout, les Américains avancent prudemment et il faut attendre le 24 pour que l’île soit nettoyée.
Le même jour, à 4 h 35, un destroyer de l’écran du porte-avions d’escorte USS Liscome Bay repère de la lumière à l’horizon et se dirige vers la position. Plus tard, l’USS Mexico détecte un écho sans pouvoir déterminer sa provenance avec précision. À 5 h 7, le destroyer indique que la lumière vient d’une bouée probablement larguée par un hydravion pour signaler aux sous-marins japonais la présence de la flotte américaine. Quelques minutes plus tard, alors que le Liscome Bay se met face au vent, le sous-marin japonais I-175, commandé par Sunao Tabata, tire une torpille. Le porte-avions est touché au centre-bâbord, la torpille détonne au niveau de la soute à carburant provoquant une explosion titanesque. Les flammes s’élèvent à plus de 100 mètres au-dessus de l’eau, l’incendie se propage à la soute à munitions qui explose à son tour. L’USS Mexico reçoit une pluie de débris d’avions, de fragment de métal et même de restes humains. Dans le porte-avions, l’évacuation est ordonnée par le commandant en second, car le Capitaine Witsie a été tué. Malheureusement, les marins se jettent dans une eau couverte d’essence et de pétrole qui finit par s’enflammer. Ainsi, parmi les marins qui n’ont pas été tués par les explosions du porte-avions nombreux sont brulés vifs. L’USS Liscome Bay coule en 23 minutes avec 644 hommes et 19 avions, soit dix fois plus de pertes que la bataille de Makin. Cette dernière n’a fait que 64 morts et 150 blessés dans les rangs américains.

Conquête des autres îles de l’archipel des Gilberts et Nauru
Le 22 septembre 1943, les Américains interceptent un message des Japonais laissant croire que la garnison de Betio va se replier sur Bairiki. Les deux îlots sont reliés par une mince bande de terre à marée basse. L’information est erronée et les Américains utilisent des moyens trop importants pour conquérir la petite île envoyant le 2ème Bataillon du 6ème Régiment de Marines. L’île n’est défendue que par quinze Japonais qui vont mourir dans l’explosion de leur bunker après qu’un avion ait incendié un baril d’essence. À 16 h 55, les Marines débarquent et s’emparent de l’île sans combat.
Le 23 septembre, Abemama est conquise après avoir été bombardée par l’USS Nautilus. Cinq Japonais sont tués par le bombardement, les 18 autres se suicident avant le débarquement des Américains.
Sur Abaiang, les cinq soldats japonais servant de garnison s’enfuient en pirogue, sans que les Américains ne puissent les rattraper. Personne ne sait ce qu’ils sont devenus.
Buota est conquise le 24 septembre sans combat.
Naa est conquise le 28, là encore sans combat.
Les atolls de Marakei et Maiana sont aussi visités par les Marines, mais ils sont vides de toute présence ennemie.
Nauru est conquise le 2 octobre quasiment sans combat. L’île n’est défendue que par 30 soldats japonais qui s’enfuient pour la plupart, les autres étant tués rapidement.
Bilan et conséquences
La bataille de Tarawa est surnommée « la sanglante » à cause des pertes terribles subies par les deux camps. Les Américains comptent 1189 morts, dont 644 dans la destruction de l’USS Liscome Bay, et 2302 blessés. Les Japonais comptent 5594 morts et blessés. Seuls 457 soldats japonais et 211 travailleurs Corée sont faits prisonniers.
Sur le plan militaire, la conquête des atolls de Tarawa, Makin, Abemama et Nauru est d’importance stratégique. Pour progresser jusqu’aux Mariannes les Américains doivent supprimer les positions japonaises pour sécuriser leurs voies de communication. Toutefois, le débarquement fut mal exécuté et même si la victoire est acquise grâce au surnombre écrasant des Marines. Les pertes subies sont de mauvais augure pour les Américains.
Première offensive américaine dans cette partie centrale du Pacifique, c’est aussi la première fois que les Américains sont confrontés dès leur débarquement à une farouche résistance japonaise, bien retranchée et bien approvisionnée. Près de 5 700 soldats, Japonais et travailleurs forcés coréens et plus de 1 800 marines américains sont tués en l’espace de 76 heures de combat, principalement sur et autour de l’île de Betio. En conséquence, cette bataille marque fortement l’opinion américaine par le nombre élevé de pertes dans un laps de temps très court et pour un si petit territoire, d’autant que fut diffusé pour la première fois aux États-Unis quelques semaines plus tard un documentaire non censuré ne cachant rien de l’extrême dureté des combats : With the Marines at Tarawa.
[1] Basé sur http://www.ibiblio.org/hyperwar/USMC/USMC-M-Tarawa/
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